« Jamais dans l’histoire de l’humanité, tant de gens n’ont dû autant à si peu » (« Never in the history of mankind was so much owed by so many to so few ») est une expression prononcé par le Premier Ministre Winston Churchill le 20 août 1940 pour remercier les pilotes de la Royal Air Force (RAF) de se battre avec autant de vigueur pendant la bataille d’Angleterre.
Parmi ces hommes, certains se sont distingués plus que d’autres. Et notamment un pilote un peu particulier … Douglas Bader.
I - Un départ « fracassant »
Douglas Robert Steuart Bader nait le 10 février 1910 à St John’s Wood, un district de Londres.
Il perd son père assez jeune quand celui-ci part avec les troupes britanniques participant à la Première Guerre Mondiale.
Il se fera tuer par un éclat de shrapnel et est enterré près de Saint-Omer.
Pendant ses études, il se montre indépendant et développe un immense amour pour l’aviation, si bien qu’il intègre l’école de l’air de Cranwell en 1928.
Il en sort 2e de sa promotion (à un fil de la 1ere place) en 1930 et est affecté au 23e Squadron à Kenley (près de Londres) où il pilote des Gloster Gamecock puis des Bulldog.
Excellent pilote de voltige sur Gamecock, il décide de faire une démonstration sur Bulldog avec des élèves le 14 décembre 1931.
Mais, moins maniable, le Bulldog n’est pas adapté à la voltige.
Alors qu’il essaie de se redresser après un tonneau, une des ailes accroche le sol et l’avion s’écrase.
Les deux jambes de Douglas sont broyées dans l’accident et il subit deux amputations à l’hôpital en peu de temps.
Avec de l’humour et une force incroyable, il se reconstruit doucement et arrive à remarcher avec des prothèses dès 1932.
Il arrive même à conduire une voiture et à voler à nouveau la même année. Mais il est retiré du service actif en 1933 avec une pension d’invalidité totale.
Il s’est alors engagé par l’Asiatic Petroleum Company (la future Shell) et se marie en 1935.
Mais l’aviation lui manque.
Heureusement pour lui, la Seconde Guerre Mondiale va bientôt embraser l’Europe et le monde.
II - La renaissance du phœnix
Au déclenchement de la guerre, il fait jouer ses contacts au ministère de l’air et se retrouve dès le 27 novembre 1939 tout seul aux commandes d’un avion.
En février 1940, il rejoint le 19e Squadron et est nommé commandant de l’escadrille 222 en avril. Il a alors 29 ans et est le plus âgé des pilotes de l’escadrille.
Avec l’escadrille 222, il part couvrir la retraite de la poche de Dunkerque où il remporte sa première victoire aérienne le 1er juin.
En juillet, il prend le commandement de l’escadrille 242.
Cette escadrille de canadiens était dans un piteux état suite à une campagne de France très chaotique (ordres, contre-ordres, mauvais commandement, etc.) et son moral est au plus bas ce qui ne s’arrange pas quand les pilotes s’aperçoivent que leur nouveau commandant est … cul-de-jatte.
Suite à une démonstration de voltige d’une trentaine de minutes, les hésitations des aviateurs sont levées.
Il résout alors tous les problèmes d’approvisionnement de l’escadrille et la déclare apte au combat peu avant le début de la bataille d’Angleterre.
Le 11 juillet, il descend un Dornier Do 17 et un autre le 21 août.
Le 30, c’est deux Bf 110 qu’il met au tapis puis un autre Bf 110 et un Bf 109 le 7 septembre.
En mars 1941, Bader quitte la 242 pour devenir commander de l’aérodrome de Tangmere dans le West Sussex.
Mais alors que tout semble lui sourire et qu’il enchaîne les victoires aériennes, il percute un Bf 109 et doit sauter en parachute. Il perd alors ses prothèses et se fait capturer par les allemands.
L’anglais est alors soigné à Saint-Omer, pas loin de l’endroit où est enterré son père, et se noue d’amitié avec Adolf Galland, un as de la chasse allemande. Une amitié qui durera jusqu’à la mort de Bader.
Douglas demande alors à envoyer un message à sa femme pour qu’on puisse lui envoyer de nouvelles prothèses.
Le message, envoyé sur les canaux maritimes internationaux d’urgence, n’obtient pas de réponse.
Mais peu après, au milieu des bombes larguées par la RAF, on retrouve une caisse contenant les jambes artificielles demandées.
C’est alors qu’il commence ses nombreuses tentatives d’évasion et, transféré de prison en prison, il arrive au château de Colditz.
Les allemands, admiratifs de l’aviateur cul-de-jatte, lui confisquent quand même ses prothèses après qu’il est refusé d’arrêter les tentatives d’évasion.
Libéré par les américains au printemps 1945, il se précipite à Paris pour retourner se battre ce qu’on lui refuse, le mettant plutôt au poste de commandant de l’école de l’air de Tangmere.
Il sera tout de même à la tête des 300 avions du défilé aérien de la victoire le 15 septembre 1945.
III - Retraite de la RAF
En 1946, il a 22 victoires aériennes et la RAF lui propose de poursuivre sa carrière en son sein.
Mais, se disant que l’aviation militaire en temps de paix allait être moins intéressante qu’en temps de guerre, il quitte pour la dernière fois la RAF en février 1946.
Douglas Bader retourne alors chez Shell, dans leur département aérien et vole autour du monde pour son entreprise.
Engagé pour la cause des amputés, il est fait chevalier en 1976 par la reine Elisabeth II.
Bader continue de se battre jusqu’en août 1982 où il fait une crise cardiaque lors d’un tournoi de golf.
Il en fera une deuxième trois semaines plus tard le 5 septembre 1982 qui lui sera fatale.
En apprenant son décès, le London Times écrira « Il devint une légende en personnifiant l’héroïsme de la RAF pendant la Seconde Guerre Mondiale ».
Un film sur sa vie est sorti en 1956 avec l’acteur Kenneth Moore dans le rôle de Bader : Vainqueur du ciel.
Il remportera le BAFTA du meilleur film britannique en 1957.